1.    Introduction

L’océan constitue le plus grand espace de vie de la planète et recouvre à l’heure actuelle 70,8 % de la surface de la Terre. Mais il faut, en fait, davantage penser l’océan en volume (de l’ordre de 1 370 millions de km3). Sa profondeur moyenne se situe autour de 3 800 m et la principale caractéristique de ce gigantesque milieu est sa continuité, donc sa connectivité. L’autre trait particulier est, par rapport au reste des eaux libres sur la planète, sa salinité. Celle-ci est extrêmement stable au large (35 g de sel par litre, 1 050 mOsm.L-1) et la composition de l’eau océanique est la même partout, ceci depuis des dizaines de millions d’années (Ma). Sa troisième caractéristique est donc sa stabilité.

 

2.    Définition et origine de la biodiversité

La biodiversité ne saurait être assimilée à une simple liste d’espèces peuplant un écosystème particulier, elle est considérablement plus qu’un catalogue ou un inventaire. C’est, en fait, l’ensemble des interactions établies par les êtres vivants entre eux, ainsi qu’avec leur environnement. Nous pouvons la définir simplement comme étant la fraction vivante de la nature.
Elle est issue d’une chimie prébiotique, bâtie sur une géodiversité antérieure, et elle s’est diversifiée dans l’océan ancestral vers 3 900 millions d’années (Ma). Des cyanobactéries sont parties à la conquête généralisée de l’océan vers 3 400 – 3 200 Ma, alors sans aucun oxygène atmosphérique.
Grâce aux pigments spécifiques des cellules, et en présence d’eau, la photosynthèse produit de l’oxygène et des sucres à partir de la lumière et du dioxyde de carbone (CO2). Elle serait apparue vers 3 500 Ma. L’oxygène a ensuite commencé à diffuser hors du milieu aquatique ; la composition de l’atmosphère actuelle avec ses 21 % d’oxygène datant d’environ 100 Ma, au Crétacé.

Les conséquences physiques des « flux » osmotiques (eau et électrolytes, « sels ») en environnement marin, dus à la salinité, ont conduit le vivant à deux types de stratégie pour l’osmorégulation (régulation de l’eau et des sels) : il existe des espèces qui ont la même pression osmotique (« salinité ») dans leurs tissus internes que celle de l’eau de mer, et d'autres qui régulent leurs tissus moins concentrés que l'eau de mer (les poissons osseux par exemple), ce qui les contraint à ingérer sans cesse de l’eau, en mer, et à très activement excréter des sels.

3.    Caractéristiques de la biodiversité marine

La biodiversité marine est bien particulière. La diversité spécifique reconnue dans l’océan ne dépasse pas 13 % de l’ensemble des espèces vivantes actuellement décrites, soit moins de 250 000 espèces. Ce chiffre est assez faible, ce qui peut être lié à deux raisons.

La première est que les connaissances, surtout pour les zones profondes et pour les microorganismes, bactéries et protistes divers, ne sont encore que très partielles : nous sous-estimons donc considérablement la biodiversité océanique (voir La biodiversité bactériennes pourrait être de 1 000 milliards d'espèces !). Pour tous les procaryotes (bactéries) et les très petits eucaryotes (protistes, levures, microalgues et microchampignons), les approches moléculaires apportent chaque jour des connaissances étonnantes. La navigation circumocéanique de Tara Océans (voir Fig. 1) nous a très récemment fourni des informations précieuses et extraordinaires (Science, vol 348 n°6237 de mai 2015) sur l’abondance et la variété des virus, bactéries et protistes (peut-être plus de 700 000 nouvelles espèces découvertes ?).