Evaluation du statut écologique des eaux côtieres Algéroises
Une gestion optimale de l'environnement requiert, de plus en plus, de disposer d'outils simples et standardisés qui permettent d'évaluer rapidement et de manière fiable la qualité globale du milieu (Pergent-Martini, 2000). Au milieu des années 1980, la notion de biosurveillance découle de ce constat. C'est-à-dire une surveillance faisant appel aux êtres vivants (Boudouresque et al, 1993) capable de rendre compte de l'évolution du milieu : il s'agit des « bioindicateurs ».
Le recours à des indicateurs biologiques est un moyen adapté, dans la mesure où ils constituent d'importants outils de gestion, qui fournissent des informations intégrées et synthétiques (Lopezy Royo, 2008).
Le développement et l'application d'indicateurs biologiques capables de renseigner sur l'état écologique des masses d'eau côtières méditerranéennes a connu un certain essor, depuis l'adoption de la directive cadre sur l'eau ou Water Framework directive (WFD) par le parlement et le conseil européen en décembre 2000. Les indicateurs biologiques retenus sont les invertébrés benthiques, le phytoplancton, les macroalgues et les magnoliophytes marines ; dénommés éléments de qualité biologique (biological quality éléments - BQE) (Lopezy Royo, 2008). Parmi ces derniers figurent les herbiers à Posidonia oceanica qui présentent les potentialités nécessaires pour cette utilisation, du fait de leur large répartition en zone littorale, de leur sédentarité, de la facilité à les récolter, de leur abondance et de leur sensibilité aux modifications de l'environnement littoral (Pergent et al, 1995 ; Pergent-Martini et al, 2005 ; Boudouresque et al., 2006).
L'utilisation de cet élément de qualité biologique va de pair avec la définition et la validation d'indices synthétiques à même de répondre aux perturbations des conditions du milieu. Ces indices, contrairement à ceux des invertébrés benthiques, des macroalgues et du phytoplancton, ne se basent pas sur la composition en espèces sensibles/tolérantes, mais évaluent l'état général de l'écosystème en utilisant différents types ou groupes de descripteurs associés à cette espèce. Plusieurs indices ont été développés en ce sens : PosWare (BUIA et al., 2005 in Gobert et al., 2009), Pomi (Romero et al., 2007), Valencian CS (Fernandez- Torquemada et al, 2008), BiPo (Lopezy Royo et al., 2009a ; 2010) et Prei (Gobert et al., 2009) et sont appliqués dans différentes régions de la mer Méditerranée (Espagne, France, Italie, Turquie,...). Par ailleurs des exercices d'intercalibration entre les indices POMI et BiPo ont été effectués et ont montré non seulement une bonne corrélation avec les pressions anthropiques spécifiques à chaque région, mais également entre eux, ce qui permet d'utiliser indifféremment ces deux indices (Lopezy Royo et al.,2011).
L'état écologique des masses d'eau est ainsi quantifié sous la forme d'un ratio entre les conditions réelles et les conditions de référence (ecological quality ratio (EQR) selon une échelle comportant cinq classes : Très bonne, bonne, moyenne, médiocre, mauvaise (Lopezy Royo, 2008).
Cette présente étude est la continuité d'un travail déjà entamé en 2011 par Sengouga et Misraoui intitulé : caractérisation des herbiers à Posidonia oceanica (L.) Delile de la baie de Bou Ismaïl.
La disponibilité de plusieurs indices synthétiques utilisant Posidonia oceanica nous offre l'opportunité d'évaluer la qualité globale des eaux côtières de certaines zones côtières algéroises déjà prospectées par Misraoui et Sengouga (2011). Deux indices sont retenus, le PREI et le BiPo, car ils nécessitent la prise en compte de descripteurs de Posidonia oceanica simples à mesurer et peu coûteux : profondeur et type de la limite inférieure, densité de l'herbier, longueur des feuilles, surface foliaire, biomasse des épiphytes. Les objectifs de cet exercice d'intercalibration sont de trois niveaux : (1) détermination du statut écologique des eaux côtières des baies de Bou Ismail, d'Alger et de Zemmouri, (2) évaluation de la comparabilité des résultats obtenus avec ces indices et (3) validation de ces indices en tenant compte des différentes pressions anthropiques qui s'exercent sur le littoral algérois.
En outre, d'autres descripteurs de la vitalité des herbiers à Posidonia oceanica sont également mesurés : le taux de recouvrement, le brown tissue area index et le nombre de cellules à tanins. Ces descripteurs permettront la mise en oeuvre d'un indice biotique, synthetic index Posidonia oceanica (SiPo), pour évaluer le statut écologique des eaux côtières algéroises proposé récemment dans le cadre d'un « projet national de recherche, 2011 » (PNR, code 2/ u 163/431).